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mamaaan ?!?
9 octobre 2014

chagrins d'adulte

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Pas besoin de le prédire ni de le lire dans les horoscopes, une vie peut être semée d’obstacles, de crèves-cœur et d’échecs. A un moment ou à un autre, il te faut prendre des décisions en te disant que ce sont les bonnes. Il faut trancher et foncer vers l’avant. Le pire est que plus tu grandis, plus tu dois faire semblant que les difficultés ne te touchent pas vraiment. Cacher tes sentiments, mettre un voile sur tes angoisses, ne pas chialer en public et surtout, ne pas être impulsif, telle est la vie des grandes personnes. Ce qui se passe en dedans, reste en dedans et créera bientôt un ulcère, un cancer ou dans le meilleur des cas, une psychothérapie qui s’échelonnera sur dix ans.

 

Parallèlement à cela, il y a tes gosses. Oui tu sais, ceux qui vivent à fond le moment présent. Ceux qui pleurent quand ils sont tristes. Qui courent, qui sautent, qui crient quand ils sont heureux. Ceux qui n’ont pas encore perdu leur naturel, qui ne différencient pas la droite de la gauche. Ceux qui boudent face à la frustration et qui, deux secondes plus tard, font des chatouilles à leurs compagnons de jeux. La franche rigolade suit le gros chagrin. Les petits poings fâchés abdiquent vite face à quelques pas de danse maladroits. Quand ma fille fait tomber sa glace par terre, c’est la catastrophe. Limite ça me fait mal au cœur. Il m’est néanmoins facile de mettre un terme à ce drame shakespearien : « Attends y’en a une autre dans l’congel ! » Facile de faire la super maman qui ne craint aucune tache sur le carrelage et aucune bouche collante. Après, il est possible que ça se complique.

 

La glace par terre va se métamorphoser. Elle prendra les contours d’un téléphone portable, d’une mauvaise note, d’un méchant camarade, d’un complexe physique, d’une tristesse amoureuse et j’en passe. La glace par terre c’est un entraînement. Une introduction. Un échauffement. Être parents est un rôle exigeant et curieux. Si tu rentres du travail avec tes soucis de grand, tu vas indéniablement les laisser dans l’entrée pour te plonger à corps perdu dans les préoccupations enfantines qui habitent ta maison. C’est simple et héroïque. Ton patron qui te prend la tête c’est quoi à côté du magnifique dessin apposé avec délicatesse sur ton feu crépi tout neuf ? Hein ?

 

Nettoyer un mur c’est pas trop compliqué, mais que ferai-je quand ma petite tête blonde aura de vrais problèmes d’adulte? Serai-je à la hauteur ? Dirai-je : « Regarde ça avec ton père ? » Me rendrai-je malade ? Est-ce que les années que l’on prend dans les dents amènent sagesse, patience et zen-attitude ? Je l’espère… Avoir des enfants c’est vouloir à la fois les donner au monde et les garder au chaud dans ses bras pour toute la vie. C’est se rendre compte qu’on est généreux et égoïste en même temps ! Eduquer c’est aussi devenir celui ou celle qui sait tout sur tout (du moins c’est ce qu’ils croient pendant quelques années). C’est être un mélange de Darius Rochebin, d’Elisabeth Teissier, du Pape, du Dalaï-lama aussi. On doit savoir ce qui se passe dans le monde, dans l’imaginaire et dans l’avenir. C’est comme ça, il faut tout leur expliquer.

 

Je ne sais pas toi mais en matière de croissance des fleurs, de Oui-Oui et son taxi et de personnes parties au ciel je pense pouvoir m’en sortir. Mais que vais-je dire lorsqu’elle me demandera pourquoi il n’y a bientôt plus d’ours blancs ? Pourquoi des milliers d’enfants meurent à cause des guerres ? Pourquoi elle est née en Europe et pas en Afrique ? Pourquoi on peut mourir jeune alors qu’on n’a rien demandé ? Pourquoi ceux qui ont beaucoup d’argent en veulent toujours plus ? Je risque d’être sacrément embêtée, parce que ces questions je me les pose aussi ! Malgré mon enfance qui s’efface, je m’interroge toujours autant. L’injustice, le mensonge, l’hypocrisie, la haine, la bêtise… tout cela fait partie de mes chagrins d’adulte. Seulement, je ne crois plus en la Maman Quisaittout, alors, je me tourne sur moi-même et je ressasse (en attendant l’ulcère..). Être parents c’est gérer ses propres chagrins et donner du sens à ceux de ses enfants. Donner du sens… Tout un programme.

 

Ces quelques réflexions normales pour les uns, sans intérêt pour les autres et évidentes pour le reste, me font penser qu’en matière de soucis du quotidien il y a peut-être de quoi apprendre de notre progéniture. Exploser de temps en temps peut être thérapeutique. Ne pas faire toujours comme tout le monde permet de se rappeler qu’un grain de folie ça fait du bien. Sous ses airs insensés la vie donne puis reprend. Profitons donc des « instants-cadeaux » voilà tout ! D’ailleurs, je crois que cette année, j’irai courir à pieds nus dans l’herbe dès le premier orage d’été..

 

Bien à toi.

 

texte paru sur 1dex.ch en mars 2014

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